A la fin des années 80, plusieurs groupes musicaux ont pris naissance dans le Compas Direct (genre musical haïtien créé par Nemours Jean-Baptiste) avec un format réduit et un nouveau style. Ces nouveaux groupes s’arrangent sous le vocable : « Nouvelle génération ». Cette tendance est marquée par un nombre réduit de musiciens , l’introduction d’instruments comme la boite à musique et le synthétiseur.
La plupart de ces groupes n’utilisaient pas la section cuivre, ni la section traditionnelle de percussions du compas direct comme le tambour, la batterie. En plus du synthétiseur, ces groupes se servaient surtout de deux guitares (lead et bass) et d’un piano.
Cette situation a attiré l’attention de plus d’un. Des opinions de deux groupes contradictoires surgissent. Le premier groupe estime que ce changement était nécessaire pour le Compas Direct. Car, à leur avis, le compas « full band »était essoufflé et ne pouvait plus drainer la même foule. Le second, au contraire, estime que cette modification était d’ordre économique. Ainsi, par exemple, avec ses trois musiciens, Sweet Micky peut mieux payer ses musiciens et tirer beaucoup plus de profit qu’un Bossa Combo avec près de quinze musiciens.
Les tenants du deuxième groupe ne cessent de mettre en question la qualité musicale des compositions de la nouvelle tendance et la banalité des textes et sujets traités. « En quoi des sons produits pars des synthétiseurs peuvent-ils agréables que ceux produits par des instruments musicaux? Des chansons comme « Men avèg la » de Top Vice ou « Forêt des pins »de Sweet Micky sont-elles plus riches musicalement qu’un « New York city » de Tabou Combo ou d’un « Bèl ti machann »de Skah Shah ? En quoi une chanson pauvre musicalement peut-elle être plus vendable dans le monde actuel ? », s’interrogent les tenants du deuxième groupe.
De plus, Tabou Combo avec son format full band a connu un succès fou en Europe, avec plus d'un million d'albums vendus. En août 1975, New-York City a atteint le premier rang des Hit-Parade français. Jusqu’à aujourd’hui, ces groupes full band sont très prisés dans les Antilles, en Amérique centrale et en Europe.
La recherche du profit, la logique de maximisation du revenu a été et est encore néfaste pour le compas direct. Cet antagonisme entre ancienne et nouvelle génération n’a pas apporté beaucoup de choses à la musique haïtienne. Les nouveaux musiciens ne sont pas si riches comme ils le souhaitaient et le compas direct peine encore à percer sur le marché international.
La musique haïtienne ne peut pas encore profiter des possibilités qu’offrent les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) pour produire, vendre et diffuser dans d’autres milieux de la planète ses compositions. Ces deux générations du Compas Direct ne sont pas si différentes qu’elles le prétendent. Maintenant, les jeunes en Haïti se cherchent dans d’autres tendances comme le Rap kreyòl. Les chansons du Compas full band sont qualifiées à tort de « mizik granmoun, mizik lontan » et celles de la Nouvelle génération, « Mizik sikre, mizik dous ».
Le compas se cherche dans de nouvelles stratégies. Les groupes de la Nouvelle génération se rapprochent de plus en plus de l’ancienne en ajoutant les instruments qu’ils ont rejetés.
Musiciens, promoteurs et disquaires, il est temps de définir de nouvelles lignes, de rédiger de nouveaux plans pour le Compas Direct en ce qui a trait à la production, la promotion et la diffusion. Que vous soyez de l’Ancienne ou de la Nouvelle génération, vous jouez, écoutez et dansez tous le même rythme : Le Compas Direct. Mettons fin aux conflits insensés. Ne nous perdons pas dans de fausses idées. Définissons plutôt de nouvelles stratégies basées sur l’innovation, la recherche pour conquérir de nouveaux marchés et produire une musique inspirée et riche.
Sons Croisés Créoles
Il y a 5 ans
Bon texte, Piti! Je dois avouer que je suis aussi d'avis que la nouvelle génération du compas direct est pauvre en musique et en texte, à des exceptions près comme Nu Look, Zenglen et peut-être d'autres. En outre, les musiciens de la nouvelle tendance du compas direct ne me convainquent pas en tant qu'artistes: ils ne font que se pavaner en exhibant leurs vêtements, voitures et bijoux. Mais quant à avoir une vision de la société, une critique articulée sur le monde social-politique-culturel, sur l'homme et la femme haïtienne, voir sur des thèmes métaphysiques comme la mort, la liberté, il me semble que la majorité d'entre eux sont sérieusement limités. En fait, un artiste n'est-il pas tout aussi bien un intellectuel, même s'il n'a pas un niveau académique très avancé? L'art est sacré, l'artiste est divin.
RépondreSupprimerTrès bon travail Baby! Ton analyse dénote une réflexion et une recherche poussées sur le sujet traité. Je pense que ceux qui évoluent aujourd'hui dans l'environnement musical haitien devraitnt en prendre note!
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